Quelques heures plus tard, les deux hommes sont encore attablés dans le brouhaha de l’Horloge du Sud. Robin, mis en confiance, lâche enfin le poids scellé dans son coeur depuis qu’il vit, solitaire, à Bruxelles. Il raconte sa carrière d’artiste raté, son histoire d’amour avec Corinne l’eurocrate, leur déménagement à Bruxelles et la disparition progressive de sa bien-aimée, au fur et à mesure de son intégration dans les ressources humaines du Parlement Européen. Sa tristesse et son isolement, alors que le mail devenait un océan infranchissable, le camembert une tour sans fenêtre et la Chaussée de Wavre, y compris l’appartement de Robin, une île dévastée par un tsunami.
Hercule Bernard embraye sur le passé artistique du quartier Léopold, les projets de résidences d’artistes, la Fondation d’Artistes. Il lui propose tout de go de prendre en main ce dossier brûlant de l’Association du Quartier Léopold. Il est vrai que celle-ci n’a déjà plus de secret pour Robin, ses membres eux-mêmes arrivent justement. Il est 19H00, l’heure de l’"Happy AQL", le rendez-vous hebdomadaire des membres qui veulent s’échanger les nouvelles.
Robin est touché mais il décline la proposition d’Hercule. Le projet lui est sympathique mais il n’a décidément pas l’âme d’un meneur. Et puis il a une idée. Et surtout, beaucoup d’images neuves en tête. Des images qui ne demandent qu’à couler sur la toile, des toiles de la taille des plus grands dinosaures de nos cauchemars d’hommes. Des oeuvres gigantesques qui gagneraient l’esplanade européenne, l’imprégneraient d’un nouveau relief, remodèleraient sa matière, avant d’aller décoiffer le dôme de pierre, pour saluer les dieux et surtout, délivrer Corinne.